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φάους), resplendissant, très-grand et très-bon, très-parfait et très-énergique ; très-intelligent et très-beau, éminent en pureté et le plus accompli des sept Amshaspands, ou êtres intelligents[1], dont il est

  1. Anquetil-Duperron, Zend-Avesta, i, ii, 81 ; Burnouf, Yaçna, 146.

    En écrivant ces deux noms célèbres, nous ne pouvons nous empêcher de relever l’erreur (erreur étrange, je dirais étrangère) d’un savant biographe qui traite Anquetil-Duperron fort lestement en l’appelant un « soldat, presque sans lettres. » Il ne faudrait pas que, pour rehausser la gloire de l’un, on abaissât celle de l’autre. Le mérite de M. Burnouf est assez éminent par lui-même sans qu’il soit besoin de le placer sur un piédestal, et le nom d’Anquetil-Duperron s’accommoderait mal à ce rôle subordonné. C’est qu’Anquetil-Duperron est une des illustrations les plus pures de la France. En Allemagne, il ne manquerait pas de gens (« presque sans lettres » me direz-vous) qui se découvriraient en prononçant son nom. En effet, personne ne surpassa jamais son amour désintéressé pour les lettres ; il endura pour elles des souffrances inouïes.

    Un homme « presque sans lettres ! » Je n’en reviens pas. Car, quelque accoutumé qu’on soit, par la lecture habituelle des journaux, aux énormités de tout genre qui s’y débitent, celle-ci cependant est tellement gigantesque qu’elle vous ferait bondir sur votre chaise. Il n’y a peut-être que quelques savants d’Oxford, aux rancunes séculaires, qui l’auront goûtée, et pour cause. — Sachez donc le grec, le latin, le persan ancien et moderne, l’hindoustani, le tamoul et tant d’autres langues encore, écrivez de gros volumes in-4o et in-folio, destinés à fonder toute une science nouvelle, et après cela entendez-vous qualifier d’homme « presque sans lettres » ! Comme c’est encourageant. N’importe ; soyons savants à la manière d’Anquetil-Duperron. Acquérons d’abord un savoir solide et classique, sacrifions ensuite tout pour l’amour de la science : liberté, patrie, famille, bien-être ; bravons les fatigues d’un voyage aussi long que périlleux, soyons en butte, pendant des années, à toutes les souffrances de l’esprit et du corps, confessons, au danger de notre vie, la morale et la foi chrétienne, n’ayons ni trêve ni repos avant d’avoir atteint notre but ; — rembarquons-nous ensuite pour l’Europe sur un vaisseau ennemi, subissons les outrages les plus sensibles à tout cœur bien né, ceux qui blessent l’honneur national ; mourons enfin accablés d’années et de privations de toute sorte, à l’âge de quatre-vingt trois ans, sur un grabat, sans feu, au milieu de l’hiver, n’ayant pour tout soutien qu’un peu de pain et d’eau : — en un mot, soyons un autre Anquetil-Duperron et remportons avec nous la certitude qu’il y a une justice, tardive il est vrai, mais immanquable ; une justice qui inscrira votre nom dans le livre de l’immortalité, à la tête de tous les autres, et qui, quoiqu’on fasse, ne permettra pas que l’éclat pur et victorieux en soit jamais amoindri.

    Redisons donc qu’Anquetil-Duperron fut savant et lettré dans la plus haute et la plus noble acception du mot, qu’il eut la plénitude de ce feu sacré que Dieu ne donne qu’aux âmes vraiment grandes ; qu’il posséda en outre le plus beau de tous les titres, qu’il fut chrétien, titre majestueux et qui vivra encore quand le temps, qui dévore tout, aura dévoré tous les autres.