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avait conclu que sa fille était sa femme. Et en effet, l’inceste n’a rien qui scandalise l’homme de nature et les peuples naïfs. Il était la règle dans les commencements de la société humaine[1]. Homère nous le montre établi déjà dans les temps mythiques, et Euripide le constate chez tous les barbares. « Toute la race barbare, dit-il, unit le père à la fille et le fils à la mère, la sœur à son frère, τοιοῦτον πᾶν τὸ βάρϐαρον γένος· πατήρ τε θυγατρὶ παῖς τε μητρὶ μίγνυται.[2]. Et il en est ainsi encore aujourd’hui[3]. » Aussi suffit-il du cri d’indignation de Yama pour nous permettre d’affirmer que le récit biblique nous est parvenu dans un état beaucoup plus ancien que la légende védique. Cela, quoique pour d’autres raisons, est sans doute le cas aussi quant au mythe d’Isis, « sœur et femme d’Osiris[4] », mais non peut-être en ce qui concerne la légende du Bundehesh, qui dit expressément que Yimâ était la sœur de Yima, son mari[5]. Les mœurs grecques, par une conséquence apparente du mariage de Saturne et de Jupiter avec leurs sœurs Rhéa et Junon, mais au fond par une situation qu’enseignaient aux époptes les mystères d’Éleusis, les mœurs grecques autorisaient aussi l’inceste ; il est certain que la pratique n’en répugnait pas au senti-

  1. Die altvetater, dit une ancienne Chronique, gabent ye einen bruder und ein swester ze sammen. (Kurze Colmarer Chronik, dans Alsatia d’Aug. Stöber, p 223.)
  2. Ἔνθ’ ὅγε θυγατέρας πόρεν υἱάσιν εἶναι ἀκοίτις. (Odyss., X, 7.) — Euripid., Andromache, 173 sqq. — V. quant aux Arabes, Strabon, XVI, c. IV, 25.
  3. V. Waitz, Anthropologie, III, 106. — Post, die Geschlechtsgenossenschaft der Urzeit, p. 53.
  4. Diodor. Sicul., I, 13, 21. Brugsch, Hist. d’Égypte, p. 14.
  5. Le Bundehesh, chap. XXXII, éd. Justi.