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les pommes de l’immortalité ; mais le blasphémateur, le fauteur de tout mal, l’infâme Loki, la séduisit avec d’autres pommes qu’il avait découvertes, disait-il, dans un bois. Elle l’y suivit pour comparer ses pommes, epli sin, avec celles du rusé et beau trompeur, la honte des dieux et des hommes, ok vömm allra godha ok manna ; mal lui en prit, car soudain elle se sentit enlevée par un géant, et le bonheur ne fut plus à Asgard[1].

Dans le Rig-Véda, la première partie du récit biblique n’est plus guère reconnaissable dans le mythe Kriçânu et de Çyena[2]. Mais il y a une scène, relatée par le 164e hymne du premier mandala, qui rappelle vivement par ses jumeaux primordiaux mangeant, l’un le doux fruit du figuier, qui a nom pippala, tandis que l’autre se borne à regarder, la scène correspondante du document biblique[3]. Et, ce qui est plus intéressant encore, c’est la reprise, dirait-on, dans le 10e mandala du récit mosaïque, au moment où la femme étant gagnée par le serpent fait son possible pour s’assurer la complicité de l’homme. Dans la Genèse, cette coopération va de soi ; Ève n’a qu’à s’offrir à Adam pour que, autre Kriçânu, l’homme lui fasse selon son désir ; mais Yama, l’Adam védique, travaillé déjà par l’esprit brahmanique, qui a évidemment présidé à la rédaction définitive du mantra que nous allons citer, Yama n’est pas de facile composition pour Yamî, l’Ève védique. En vain celle-ci lui dit : Les dieux

  1. V. Gylfaginning, 26, 33 ; Bragarödhur, 56, dans Edda Snorra Sturlusonar, I, p. 99, 104, 210, éd. Hafniae, 1848.
  2. Voir mes Recherches sur la religion première de la race indo-iranienne, p. 142, 2e édit.
  3. Ibid., p. 139 sqq.