Page:Schoebel - Le Mythe de la femme et du serpent.djvu/41

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 35 —

la divinité, suivant une croyance populaire[1], eut donc une grande influence sur la pensée de nos ancêtres naissant à la vie intellectuelle, mais cette influence ne fut pas exclusive, alors même qu’ils ne raisonnèrent pas comme la Hagada le dit d’Abrâm[2]. Ce qui, primitivement, occupa l’homme plus que le soleil ou tout autre agent cosmique, on peut l’assurer sans crainte de se tromper, ce fut lui-même, sa propre personne. Homo sibi Deus : voilà le ressort principal et le fait capital de l’histoire humaine. C’est son individu qui l’attachait tout d’abord par les liens les plus intimes et les plus puissants, et cela est si naturel qu’encore aujourd’hui il ne pourrait en être autrement. Notre individu est constamment pour nous une source inépuisable de surprise, d’étonnement et de réflexion. Or, dans le nombre des motifs qui donnaient à penser aux hommes primitifs, se trouvaient certaines fonctions corporelles, celles surtout qui concourent ouvertement à nous faire vivre et exister. Ainsi, par exemple, l’acte de manger, à la suite duquel on se sentait renaître, prenait un caractère mystérieux, et la nourriture devenait une chose divine, une divinité. La nourriture, dit une Upanishat, est produite de Brahma, et, à son tour, elle produit le souffle vital, l’âme, la réalité et ce qui est immortel dans les œuvres humaines : (Brahma)

    l’Inde. (V. Reise in Ostind., III, 169.) J’avais d’abord cru que c’étaient là des exagérations de langage, mais il m’a fallu y ajouter foi après avoir vu l’effet d’un « coup de lune > sur un militaire revenant de la Cochinchine.

  1. V. A. Stöber, Alsatia, 1875, p. 163.
  2. Il ne voulait pas adorer la lumière, le feu, parce que, disait-il, l’eau était plus puissante en l’éteignant. (V. Jolowicz, Polyglotte der orient. Poesie, p. 289.)