Page:Schoebel - Le Mythe de la femme et du serpent.djvu/39

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 33 —

du démon mystérieux sans penser à mal, lui sacrifiaient même et le couronnaient. C’étaient même les vestales qui étaient préposées à la garde de son simulacre. Sous le nom de Liber, Fascinus (nous retrouverons ce nom tout à l’heure), Fascinus était en effet, non de la plèbe divine, suivant l’expression de saint Augustin, mais du nombre des dieux choisis, qui selecti appellantur[1]. On mettait sous sa protection, on dirait par une sorte d’homéopathie morale, jusqu’aux petits enfants[2], leur inoculant le virus pour les préserver du virus. C’est le principe sur lequel repose la foi aux amulettes, et il s’agit ici en effet de cette superstition. Mais, avant de continuer ce sujet, une remarque préliminaire ne nous paraît pas déplacée.

On s’aventure beaucoup quand on veut ramener les choses morales et religieuses de notre race au seul culte des phénomènes cosmiques, au culte surtout de la lumière et de ses agents. Holtzmann a pleinement raison de s’élever avec force contre un procédé qui menace de dégénérer en manie et de fausser toute la science de la mythologie comparée[3]. La lumière, il n’y a pas de doute, le nom même de la divinité, chez plusieurs peuples indo-européens, le prouve avec la dernière évidence ; la lumière fut dès l’abord un des facteurs les plus importants dans le mouvement religieux primitif de notre race ; son rôle réellement saisissant dans l’ordre cosmique l’y prédestinait :

  1. August., Civit. Dei, VII, 5, 21.
  2. Pline, Hist. nat., XXVIII, 4, 7 : Illos (infantes) religione tutatur et Fascinus, imperatorem quoque non solum infantium custos, qui deus inter sacra Romana a Vestalibus colitur.
  3. Holtzmann, Die altere Edda, p. 566, 582.