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INDE FRANÇAISE

L’HISTOIRE DES ORIGINES

ET DU DÉVELOPPEMENT


DES CASTES DE L’INDE[1],
Par CHARLES SCHOEBEL,
Membre de la Société Académique Indo-Chinoise,
(Extrait du Bulletin de la Société Académique Indo-Chinoise)
2e série, t. III, Janvier 1883.


SECONDE PARTIE[2].


Cette enquête consiste à recueillir les renseignements que contiennent sur les castes les brâhmanas et les sûtras.

Mais le nombre de ces recueils liturgiques, légendaires, doctrinaux, grammaticaux, philosophiques, théologiques et littéraires est énorme, et tous parlent plus ou moins des castes. Il devient ainsi matériellement impossible de les citer tous en ce Mémoire, et cela d’ailleurs serait aussi inutile que fastidieux. Tous, en effet, ne font guère que varier le passus typique de l’hymne à Purusha ou Nârâyana qu’on lit dans le 10me mandala du Rig-Veda, et dont voici la rédaction :

Brâhmano’sya mukhamâsid bahû râjasyah kritah
ûrû tadasya yad vaiçyah padbhyân çûdro ajâyatah.

« La bouche de (Nârâyana) fut le brâhmane ; ses bras (devinrent la caste) du râja ; ses cuisses (furent) le vaiçya ; le çudra naquit de ses pieds[3]. »

Voilà la genèse des castes dans la théorie brâhmanique. Elle se présente avec le titre sacré de la révélation divine, la çruti, et les autres Védas, le Yajur et l’Atharva, ne manquent pas de la reproduire[4]. L’Atharva ou Brahma-Véda, comme on doit l’attendre de son caractère exorciste, cabalistique et magicien, se plait à exalter encore la nais-

  1. Communication lue à la Société Académique Indo-Chinoise dans sa séance du 31 janvier 1883. — Un prix de 2, 000 francs a été décerné par l’Institut à ce mémoire.
  2. Voir la première partie au Bulletin de la Société Académique Indo Chinoise, 2e série, t. II, 1882, p. 10-56.
  3. Rig-Veda, X, 90, 12 ; vol. VI, p. 248, éd. M. Muller. — Il est curieux d’observer au sujet du Çûdra, qu’Hérodote signale (III, 99) parmi les peuples indiens inférieurs et doués d’inclinations perverses, les Padéens, Παδαῖοι, dont le nom est évidemment formé de pâda pied. C’est du moins l’opinion de Benfey (Indien, p. 41), et je la crois fondée. En effet, le Çûdra est aussi appelée paja, que Wilson explique par pâda, a foot, and ja born (from the feet of Brahmâ).
  4. Je ne parle pas du Sâma, qui, recueil d’hymnes composés de centons amalgamés à la manière des psaumes du bréviaire romain, contient à peine une allusion aux castes.