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les lois et l’ancien culte, et réduisirent à quatre[1] les sept classes primitives. La leur fut la première, et les mit au-dessus des rois : c’est cette division qui existe encore aujourd’hui. »

Ainsi, selon Sonnerat, l’institution des castes est, en principe, le fait d’un conquérant égyptien, et le développement du système a eu lieu à la suite d’une réforme religieuse plus ou moins violente. On démêle dans cette explication le sentiment d’une vérité historique ; l’erreur n’existe que quant à la forme. Ainsi il se peut que l’institution des castes se soit faite ou du moins consolidée par l’intervention d’un roi victorieux ; il y a des cas, on le sait, où cela s’est passé ainsi, au Nepâl, par exemple[2] ; et il est arrivé aussi, que le brâhmanisme, triomphant du boudhisme, a ramené le désordre des classes que l’indifférence ou la tolérance des « brachmanes ou sages » buddhiques avait laissé s’établir, au type primitivement indiqué par le régime féodal, au type désormais canonique des quatre castes. La question sera traitée en son lieu, avec tous les développements convenables.

Pour le moment, je continue ma revue et j’arrive à un historien dont on loue généralement les « Recherches historiques sur l’Inde, et qui n’est autre que W. Robertson. On voit cependant que sur plusieurs points, et notamment sur les castes, dont il a décrit du reste exactement les quatre principales[3], les renseignements de cet écrivain sont loin d’être solides. Sans doute qu’il n’avait pas lu ce que, déjà de son temps, avait publié sur les choses indiennes son éminent compatriote, Henry, Thomas Colebrooke. Sans cela, il n’aurait pas pu dire, par exemple, que le « Mahabarat » est « le plus ancien livre des Indiens » et que l’Hecto-Pades (l’Hitopadeça) est d’une grande antiquité, ni estropier non plus comme il le fait les noms de trois castes en Chehterée, Bice et Sooder. Je sais bien qu’en anglais la prononciation corrige un peu ce que l’orthographe a de choquant pour nos yeux et que certaines parties des livres susdits sont, quant au fond, réellement d’une antiquité fort respectable ; mais un historien érudit comme Robertson est tenu à s’exprimer avec la plus grande exactitude possible.

Mais signalons quelques erreurs relativement aux castes. L’auteur parle d’une cinquième caste, qu’il appelle Burrun Sunker et dans laquelle il range les individus issus de l’union illégitime entre des personnes de castes différentes. Mais ces personnes ne constituent pas une cinquième caste, qui n’existe pas, nous avons déjà cité à cet égard un texte de Manu ; elles constituent les out-casts, ce qui veut dire qu’elles ont perdu le droit de faire partie de n’importe quelle caste. Puis, il

  1. Qu’il nomme tantôt Brames, Xatriers, Veinsjas, Soudras, tantôt Brames, Sétréns Vassiers, Choutres.
  2. V. D. Wright, History of Nepal, p. 113 ; Cambridge, 1877. L’ouvrage est fait sur une chronique indigène.
  3. William Robertson, An historical disquisition concerning the knowledge which the ancient had of India, p. 338 sqq. London 1791, in 4o.