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nous connaîtrons le monde, plus nous nous en émerveillerons ; et si nous devions connaître ses principes ultimes et ses lois les plus générales, notre sentiment d’émerveillement et de révérence dépasserait toutes limites. On ne gagne rien à se représenter Dieu comme cachant jalousement à ses créatures la structure la plus intime de sa création ; en effet, une conception plus digne de L’Être Suprême devrait impliquer qu’aucune limite ultime ne soit fixée à la connaissance des êtres auxquels un désir infini de connaissance a été donné. L’existence d’un ignorabimus absolu constituerait un problème extrêmement contrariant pour un esprit philosophique. Ce serait un grand pas en avant pour la philosophie si l’on pouvait se débarrasser du fardeau de ce problème déconcertant.

Cela est évidemment impossible, dira-t-on, car il y a sans aucun doute des questions auxquelles on ne peut pas répondre. Il est très facile de poser des questions dont les réponses, nous avons les plus fortes raisons de le croire, ne seront jamais connues d’aucun être humain. Que faisait Platon à huit heures du matin le jour de son cinquantième anniversaire ? Combien pesait Homère lorsqu’il a écrit la première ligne de l’Iliade ? Existe-t-il, de l’autre côté de la lune, une pièce d’argent longue de cinq centimètres et ayant la forme d’un poisson ? Il est évident que les hommes ne connaîtront jamais les réponses à ces questions, quels que soient leurs efforts. Mais en même temps, nous savons qu’ils n’essaieront jamais beaucoup. Ces problèmes, diront-ils, n’ont aucune importance, aucun philosophe ne s’en préoccuperait, aucun historien ou naturaliste ne se soucierait de connaître ou non les réponses.

Nous avons donc ici certaines questions dont l’insolubilité ne préoccupe pas le philosophe ; et il y a manifestement des raisons pour lesquelles elle ne doit pas le préoccuper. C’est important. Nous devons nous contenter de questions insolubles. Mais que se passerait-il si l’on pouvait montrer qu’elles sont toutes d’une nature telle qu’elles ne causent aucune inquiétude vraiment sérieuse au philosophe ? Dans ce cas, il serait soulagé. Bien qu’il y ait beaucoup de choses qu’il ne peut pas savoir, le véritable fardeau de l’ignorabimus serait enlevé de ses épaules. À première vue, il semble y avoir peu d’espoir, car certaines des questions les plus importantes de la philosophie sont généralement considérées comme appartenant à la classe des problèmes insolubles. Examinons attentivement ce point.

Que voulons-nous dire lorsque nous qualifions une question d’importante ? Quand considérons-nous qu’elle présente un intérêt pour le philosophe ? D’une manière générale, lorsqu’il s’agit d’une question de principe ; une question qui se réfère à une caractéristique générale du