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des choses « entrant dans l’esprit » tout en restant ce qu’elles étaient avant d’y entrer. (C’est une image vraiment trop primitive que de comparer la conscience à une boîte dans laquelle on peut mettre et retirer des objets. Et nous nous étions déjà convaincus il y a quelques minutes que l’on ne peut jamais dire que le même contenu est ici et là, « dans » l’esprit et « en dehors » de lui, car tout ce que nous dirons n’exprimera que la structure. D’ailleurs, les mots « conscience » et « esprit » sont tellement perfides que pratiquement toutes les phrases philosophiques où ils apparaissent sont dépourvues de sens. J’aimerais aller jusqu’à dire que ces termes n’ont un sens correct, honnête et définissable que dans l’usage courant du langage ordinaire, comme lorsque je dis « il a l’esprit vif » ou « elle a perdu conscience » ).

Mais quoi qu’il en soit, je pense que la raison pour laquelle l’idéalisme est la forme préférée de la métaphysique est maintenant claire : le métaphysicien est à la recherche d’un contenu (appelé « essence réelle de l’être » ou « nature intérieure des choses », etc.) qu’il ne trouve que dans ses propres perceptions, sentiments, idées (appelées mentales), et il prononce alors triomphalement le principe fondamental de l’idéalisme : « la nature intérieure de toute chose est mentale » — ce qui, nous venons de le voir, n’est qu’un enchaînement de mots dépourvus de sens.

Il n’est pas nécessaire d’ajouter que d’autres systèmes métaphysiques, comme le dualisme ou le matérialisme, ne valent pas mieux. Il est facile de voir dans les arguments pour et contre ces points de vue (qui remplissent nos livres d’essais philosophiques) que les matérialistes et les dualistes (et toutes les autres variétés de métaphysiques qu’il peut y avoir) croient qu’ils nous disent quelque chose sur le contenu. Il n’est pas facile de voir comment le mot « matière » (signifiant substance physique) pourrait être considéré comme désignant le contenu — et c’est pourquoi la métaphysique matérialiste a été en général moins favorisée que l’idéalisme — mais il n’y a pas de doute que c’est ainsi qu’il a été entendu depuis l’époque de Démocrite. La caractéristique essentielle de ses atomes matériels était qu’ils occupaient de l’espace, et comme il n’était évidemment pas possible de faire la distinction entre l’espace physique et les espaces intuitifs, le remplissage de l’espace était considéré comme un contenu avec lequel nous avions une accointance directe.

Mais il n’est pas nécessaire ici de pousser plus loin la critique des systèmes métaphysiques et la tentative de comprendre leurs erreurs ; il est temps de tirer les conclusions positives importantes de notre résultat selon lequel toute connaissance est une expression, et que toute expression est un rendu de la structure, et non du contenu.