Page:Schlick - Gesammelte Aufsätze (1926 - 1936), 1938.djvu/202

Cette page n’a pas encore été corrigée

(yeux et centres optiques) ne fonctionne pas correctement ; car en réalité l’affirmation que quelque chose ne va pas dans ses facultés perceptives est identique à l’affirmation que les structures qui déterminent le caractère général de sa vie consciente sont connectées ou déconnectées d’une manière qui diffère d’une manière bien définie de la vie des êtres humains normaux. Cette dernière affirmation pourrait être formulée plus brièvement en disant que la structure du monde de l’expérience présente une différence typique bien définie dans les deux cas. Toutes ces affirmations, malgré leur formulation différente, ont exactement la même signification.

Ainsi, nous sommes toujours confrontés au même résultat : là où il peut sembler nécessaire ou possible de parler de contenu, un examen plus approfondi montre que c’est inutile et impossible. Tout ce que l’on peut dire et — qui plus est — tout ce que l’on peut vouloir dire est toujours dit sans mentionner le contenu. Le contenu ne peut être mentionné, il est inexprimable.

Si vous m’objectez que dans cette phrase et dans toutes les explications présentées sur ces pages, j’ai toujours essayé de dire quelque chose à propos du contenu, je peux vous rappeler que j’utilise délibérément un langage incorrect en ce moment, en espérant vous convaincre à la fin que je ne suis pas coupable d’une contradiction aussi grossière.

Il serait absurde de considérer l’inexprimabilité du contenu comme une merveilleuse découverte ou comme une nouvelle intuition profonde. Au contraire, personne ne le nie sérieusement. Elle n’est peut-être pas énoncée expressis verbis, mais elle se révèle dans nos actes quotidiens. Même l’homme de la rue n’essaierait pas d’expliquer à un aveugle l’essence de la couleur. L’homme de la rue sait que le contenu qu’il croit, par exemple, être indiqué par le mot « peur » ne peut être communiqué mais doit être appris par l’expérience de la peur (un des contes de Grimm traite de ce sujet), et ainsi de suite. Il est important de noter qu’il sait qu’une telle communication ou expression est impossible non pas parce qu’il a essayé de le faire de plusieurs façons et a échoué à chaque fois, mais parce qu’il ne peut même pas l’essayer, il ne voit aucune façon possible de le faire ; il est comme un homme à qui l’on demande de traduire une phrase dans une langue qu’il ne connaît pas : l’impossibilité n’est pas empirique, mais logique.