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il est capable de construire n’importe quelle structure spatiale, et donc aussi la structure du système des couleurs, parce qu’elle peut être représentée par une image spatiale comme celle du double cône ou d’un dispositif similaire).

La description d’un objet coloré ne communique de contenu à personne, qu’il s’agisse d’un aveugle ou d’un voyant, mais lui laisse le soin de le fournir à partir de son propre stock. Vous direz sans doute que seul le voyant fournira vraiment la « couleur », tandis que l’aveugle fournira un autre contenu, et vous affirmerez que ce dernier, bien qu’il croira comprendre parfaitement la description, en est en réalité très loin, car la « vraie » interprétation doit être donnée en termes de « couleurs », et que rien d’autre ne peut les remplacer.

Je réponds que vous avez tout à fait raison si par « couleur » vous entendez quelque chose qui a trait à la vision, c’est-à-dire qui implique l’utilisation de certains organes sensoriels particuliers appelés « yeux ». Il vous est loisible de dire, en guise de définition, qu’une interprétation ne sera reconnue comme vraie que dans le cas d’une personne capable d’utiliser ses yeux de façon normale. Ce serait tout à fait légitime. Si je vous demandais si M. X pouvait ou non comprendre correctement la description d’une image colorée, vous pourriez le soumettre à certaines expériences (qui consisteraient à observer ses réactions aux couleurs présentées à ses yeux), et les résultats vous permettraient de répondre à ma question par oui ou par non (dans ce dernier cas, vous déclareriez M. X aveugle ou daltonien).

On ne peut rien dire contre cette procédure qui, comme nous le savons, est effectivement utilisée dans certains tests, mais je ne peux pas être d’accord avec vous si vous pensez qu’elle est basée sur autre chose qu’une définition arbitraire, bien que très sensée. Je soupçonne que vous êtes enclin à argumenter quelque peu dans le sens suivant : « Si j’observe un homme qui utilise ses yeux de la même manière que j’utilise les miens, je suis fondé à croire qu’il éprouve dans sa conscience exactement le même genre de sensations que moi lorsque les mêmes objets sont présentés à mes yeux, de sorte qu’il sera en mesure de remplir une structure donnée avec le même contenu que celui que j’ai à l’esprit lorsque j’essaye de lui communiquer ce que j’ai vu. Je dois nécessairement considérer son interprétation comme la seule juste, car lui seul peut utiliser le bon contenu pour celle-ci. »

Cet argument parle des sensations visuelles non seulement comme de quelque chose qui a certaines relations avec les organes des sens (ou, ce qui reviendrait à