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L’étude de l’histoire de la philosophie est peut-être la plus fascinante des recherches pour quiconque est avide de comprendre la civilisation et la culture de l’espèce humaine, car tous les différents éléments de la nature humaine qui servent à édifier la culture d’une époque déterminée ou d’une nation se reflètent d’une manière ou d’une autre dans la philosophie de cette époque ou de cette nation.

L’histoire de la philosophie peut être étudiée de deux points de vue distincts. Le premier point de vue est celui de l’historien ; le second est celui du philosophe. Ils aborderont chacun l’étude de l’histoire de la philosophie avec des sentiments différents. L’historien sera saisi du plus grand enthousiasme au contact des grandes œuvres des penseurs de tous les temps, au spectacle de l’immense énergie mentale et de l’imagination, du zèle et du désintéressement qu’ils ont consacrés à leurs créations, et l’historien tirera le plus grand plaisir de toutes ces réalisations. Le philosophe, bien entendu, lorsqu’il étudie l’histoire de la philosophie, sera également ravi, et il ne pourra s’empêcher d’être inspiré par la merveilleuse manifestation du génie à travers tous les âges. Mais il ne pourra se réjouir du spectacle que lui offre la philosophie avec exactement les mêmes sentiments que l’historien. Il ne pourra pas jouir des pensées des temps anciens et modernes sans être troublé par des sentiments d’une tout autre nature.

Le philosophe ne peut se contenter de demander, comme l’historien le ferait pour tous les systèmes de pensée — s’ils sont beaux, s’ils sont brillants, s’ils ont une importance historique, etc. La seule question qui l’intéressera est la suivante : « Quelle vérité y a-t-il dans ces systèmes ? » Et aussitôt qu’il la pose, il sera découragé en examinant l’histoire de la philosophie car, comme vous le savez tous, il y a tant de contradictions entre les différents systèmes — tant de querelles et de conflits entre les différentes opinions qui ont été avancées à différentes époques par différents philosophes appartenant à différentes nations — qu’il semble à première vue tout à fait impossible de croire qu’il y ait quoi que ce soit qui ressemble à un progrès constant dans