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foi que des êtres humains ont professée, toute religion que vous désignez par un nom et un caractère distincts, et qui peut-être a depuis longtemps dégénéré en un code d’usages vides de sens, en un système de concepts et de théories abstraites ; si vous remontez à la source, si vous examinez leurs éléments originels, vous trouverez que toutes les scories mortes ont été jadis des jets ardents du feu intérieur, que toutes contiennent de la religion, et plus ou moins de ce qui constitue sa véritable essence, telle que je vous l’ai présentée ; que chacune a été une des formes que la religion éternelle et infinie a nécessairement dû revêtir, au milieu d’êtres finis et limités.

Cependant, afin que vous ne tâtonniez pas au hasard [248] dans ce chaos infini — car je dois renoncer à vous y diriger de manière à en faire l’exploration méthodique et complète, ce serait là un objet d’étude pour une vie et non pour un entretien — afin que, sans être induits en erreur par des concepts courants, vous puissiez mesurer à une juste mesure la vraie teneur et la véritable essence des diverses religions, et distinguer, conformément à des idées nettes et solides, l’intérieur de l’extérieur, la nature propre de l’élément emprunté et étranger, le sacré du profane — commencez par oublier chaque religion particulière, et ce qui est considéré comme sa marque caractéristique, et cherchez d’abord, en allant du dedans au dehors, à parvenir à une idée générale de ce qui constitue effectivement l’essence de telle ou telle forme déterminée de la religion. Vous trouverez alors que les religions positives sont précisément les formes déterminées sous lesquelles la religion infinie se manifeste dans le fini, et que la religion naturelle ne peut avoir aucune prétention à être quelque chose de semblable, vu qu’elle n’est qu’une idée indéterminée, indigente et misérable, qui ne peut avoir aucune existence propre en elle-même et pour elle-même. Vous trouverez qu’il ne peut y avoir de véritable développement structurel de la disposition religieuse que dans les religions positives, [249] et que celles-ci, à considérer leur essence, ne portent à cet égard nulle atteinte à la liberté de leurs adhérents.

Pourquoi ai-je admis que la religion ne peut être