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Les Étrusques, maîtres d’une moitié de l’Italie, sages, entreprenants et industrieux, formèrent une grande population, et devinrent puissants sur terre et sur mer. Leur prospérité date d’un temps antérieur à nos connaissances historiques. Leurs flottes couvraient la Méditerranée, ils avaient des relations importantes de paix et de guerre avec les Carthaginois et les républiques grecques établies en Sicile et dans la grande Grèce, tandis que Rome ou n’existait pas encore, ou n’était connue que de ses plus proches voisins. Du nombre de ceux-ci était le peuple de Véïes, l’un des douze états fédérés de l’Étrurie proprement dite. Cette ville était située à si peu de distance de Rome, que du haut des sept collines on pouvait découvrir le faîte de ses édifices, dont l’éclat contrastait avec les humbles et rustiques demeures de ses conquérants futurs.

Véïes fut prise l’an de Rome 359, après un siège aussi merveilleux que celui de Troie. Depuis cet événement la fortune des Étrusques, déjà ébranlée par d’autres causes, ne fit que décliner, quoique leur chute totale fut différée encore pendant plus d’un siècle. Déjà du temps d’Auguste il restait à peine quelques ruines de cette ville, jadis rivale de Rome. « Et vous aussi, dit Properce, vous aussi fûtes un empire, antique Véïes ! Sur votre place publique <aussi présida la chaire curule, décorée d’or et d’ivoire ! A présent le pâtre désœuvré fait retentir son cor dans l’enceinte de vos murs, et l’on recueille des moissons sur vos cendres. » Le poëte, en peignant cette scène de désolation, semble présager la destinée future de sa propre patrie, ce terme fatal marqué pour toutes les œuvres humaines, et auquel Rome, qui avait renversé tant