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phénomènes physiques, sont palpablement fausses. Tout cela n’est que de l’Épicure versifié. Ce qui le rend poëte, c’est un profond sentiment de la nature. De ce côté Empedocle, dont il parle avec tant d’enthousiasme, était sans doute son modèle.

6.

« Grande est la Diane d’Éphèse ! » Si le peuple criait encore ainsi comme du temps de l’apôtre saint Paul, je serais très-disposé à faire chorus, et sans qu’on pût me dire : Vous êtes orfèvre, monsieur Josse. — Au fond, ce n’était pas la Diane d’Éphèse, mais la Diane de l’univers, la mère inépuisablement féconde et la nourrice intarissable de tout les êtres vivants. Il en existe encore des statues dans le style hiératique. L’image est monstrueuse, mais la conception est sublime.

7.

Le christianisme a anéanti le sentiment de la nature. C’est pourquoi le mécanisme domine dans la physique moderne. Les physiciens et les naturalistes de nos jours sont infiniment supérieurs aux anciens, par la multiplicité et l’exactitude des connaissances. Ils doivent cet avantage à quelques découvertes accidentelles et aux instruments perfectionnés. Mais le calcul, l’observation et l’expériment ne conduisent pas au sanctuaire de la déesse. Il ne se font faute de parler souvent de la nature ; mais si vous y regardez de près, ils entendent toujours (pour me servir d’une expression des scolastiques) la nature naturée, c’est-à-dire la masse indéfinie des produits matériels ; ils ne