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me réserve le droit de prêter l’oreille de préférence à la voix du rocher, et j’espère bien l’entendre comme l’ont entendue les ermites centenaires sur les rives du Gange, et le mystérieux Pythagore, et le divin Platon.

2.
dara-chouco.

Vers la fin du dix-septième siècle il y avait dans l’Inde un prince aimable et généreux, appelé Dara-Chouco, frère de l’empereur Aurengzèbe, qui le fit périr par la raison d’état.

J’ai devant moi la copie d’une peinture indienne qui représente Aurengzèbe, assis sur son trône et entouré des grands dignitaires, au moment où on lui apporte sur un plat d’or la tête de son frère, coiffée encore d’un turban royal, surmonté d’une aigrette et garni de perles et de diamants.

Dara-Chouco, dans sa jeunesse, fut embrasé d’une noble ardeur d’approfondir les choses divines. Élevé dans les opions exclusives de l’Islamisme, il ne put se contenter de l’Alcoran. Il s’informa auprès des guèbres de la doctrine de Zoroastre ; il n’en fut pas satisfait. Il lut dans une traduction orientale les livres sacrés des Juifs et des chrétiens ; il n’en fut pas satisfait encore. Il engagea des brahmanes savants à traduire pour lui en persan les morceaux les plus importants des Vèdes. Je crains bien que ces interprètes, à force de fidélité, n’aient rendu des passages déjà fort obscurs en eux-mêmes, complètement inintelligibles. Le persan moderne n’est pas de force à se