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LE BOUDDHISME AU TIBET

contradiction flagrante avec le principe mahāyāna que la méditation sur un objet quelconque empêche l’homme d’atteindre au plus haut degré de perfection[1].

III. Le récit de paroles et sentences mystiques, Dhārānis (tib. Zoung), dispense sur l’homme toutes sortes de félicités et lui assure l’assistance des Bouddhas et Bodhisattvas. Ces Dharanis[2] ont été adoptés par suite de ce besoin de charmes, remèdes contre la crainte du danger, qui se fait partout sentir ; cependant les bouddhistes croient qu’ils ont été donnés par Sakyamouni, ou par les Bouddhas, Bodhisattvas et dieux sur qui les Dharanis sont supposés exercer leur influence.

D’après les livres sacrés le nombre des formules enseignées par ces dieux est immense et toutes sont tenues pour également efficaces. Wassiljew pense que le grand nombre auquel il est fait allusion se rapporte à la quantité de vers (Gāthās) ou même de simples mots des traités qui décrivent leur puissance et les cérémonies au courant desquelles on les récite. Ces formules sont ou de courtes sentences, ou même un petit nombre de mots tels que les noms et épithètes des Bouddhas et des Bodhisattvas. Il y a quelques Dhārānis qui valent la pratique des Paramitas ; d’autres soumettent les dieux et les génies, ou appellent les Bouddhas et les Bodhisattvas ; quelques-uns procurent la longévité ou l’accomplissement des souhaits ; d’autres guérissent les maladies, etc.

On prétend même que la seule prononciation des lettres dont le Dhārāni est composé ou bien leur seul aspect donne pouvoir sur les êtres dont il traite, ou fait réussir les desseins pour lesquels on suppose que ces divinités accordent leur assistance.

Il ne faut pas altérer les Dhârânis en les récitant ou en les écrivant, car chaque lettre a son pouvoir magique et c’est en raison de cette croyance qu’on ne les a pas traduits en tibétain et que l’alphabet tibétain a été adapté à la reproduction exacte de chaque lettre sanscrite[3].

  1. Voyez p. 25.
  2. Comparez Burnouf, Introduction, pp. 522, 574 ; Wassiljew, l. c., pp. 153, 193.
  3. Les noms sanscrits des Bouddhas et Bodhisattvas ont pourtant été traduits en tibétain, mais ces noms sont rendus aussi littéralement que possible. Je citerai comme exemple Amitābha et Odpagmed ; Avalōkita et Chenresi ; Vadjrasattva et Dordjeschang. Pour le plan alphabétique du sanscrit écrit en caractères tibétains, voyez la grammaire de Csoma, p. 20.