Page:Schlagintweit - Le Bouddhisme au Tibet.djvu/236

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
136
ANNALES DU MUSÉE GUIMET

dans les images que nous possédons il est représenté les jambes croisées comme les autres Bouddhas.

Les Bouddhas, toutes les fois qu’ils occupent le centre d’un tableau[1], sont assis sur le trône des lions, en sanscrit Timhasana en tibétain Sengti ou Senge-chad-ti, « le siége de huit lions ». Ce trône est ainsi nommé des huit lions qui le soutiennent ; dans les dessins cependant on ne voit que deux lions en avant. Sur le trône est étendu un tapis appelé « la couverture de dessus », tibétain Tenkab ; un de ses bouts pend par terre et a pour ornements des symboles ou la figure d’un dieu. Des deux côtés de cette Tenkab on voit souvent deux têtes d’animaux qu’Hodgson appelle « les soutiens »[2]. Comme chaque Bouddha et Bōddhisattva a son animal particulier, cela peut aider matériellement à trouver le sujet des tableaux. Dans les images de Sākyamouni deux paons sont souvent dessinés aux deux côtés de la Tenkab, la forme de leurs longs cous rappelle le gazon Kousa dont le Bouddha fit le coussin sur lequel il s’assit sous l’arbre Bōdhi pour obtenir la sagesse suprême. Le trône est entouré d’un cadre richement ornementé, composé d’animaux fantastiques ; ceux d’en bas sont représentés couchés, les autres sont debout sur la tête des premiers et lèvent leurs pieds de devant. En haut du cadre figure ordinairement l’oiseau mythologique Garouda[3]. L’intérieur du cadre porte le nom de Jabyol, « le rideau de derrière » ; il est habituellement de couleur foncée. Le siége du trône est une fleur de lotus.

Les Bōdhisattvas, les Dhyanis Bōdhisattvas comme ceux d’origine humaine, sont représentés, comme les Bouddhas, avec un air souriant et une gloire ; leurs cheveux sont ordinairement rejetés en arrière du front et arrangés en un cône qui se dresse sur la tête, et quelquefois montre la frisure des che-

  1. Les Tibétains aiment à grouper plusieurs dieux dans le même tableau ; les uns sont représentés avec des attitudes formidables et les autres montrent une expression souriante. La figure principale occupe le centre ; les personnages qui l’entourent ont ou n’ont pas de rapport avec elle. La figure centrale est souvent assise sur un trône au milieu d’un paysage représentant l’océan bordé de rivages escarpés ; deux montagnes neigeuses s’élèvent à droite et à gauche ; au-dessus de la figure s’étend un ciel sombre, nuageux, où le soleil et la lune sont figurés par deux cercles brillants. Comparez Pallas, Mongol. Volker, vol. II, p. 105.
  2. Illustrations, p. 43. Les signes mystiques sur la Tenkab sont appelés par cet auteur Connaissances ou Moudras. W. O. Humboldt, Kawi Sprache, vol. I, p. 137, les compare à un cimier héraldique avec ses supports.
  3. On les rencontre déjà dans les anciennes statues ; voyez Crawford, Lit. Soc. of Bombay, vol. II, p. 154, réimprimé dans son Archipelago. Des piliers avec sculptures d’animaux mythologiques sont un ornement fréquent dans l’architecture hindoue ; par exemple le principal temple de Tandjor.