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ÉGALITÉ DES HOMMES ET DES FEMMES.


La pluspart de ceux qui prennent la cause, des femmes, contre 1 cette orgueilleuse preferance que les hommes s’attribuent, leur rendent le change entier : 2 r’envoyans la preferance vers elles. 3 Moy qui fuys toutes extremitez, je me contente de les esgaler aux hommes : la nature s’opposant 4 pour ce regard autant à la superiorité qu’à l’inferiorité. Que dis-je, il ne suffit pas à quelques gens de leur preferer le sexe masculin, s’ils ne les confinoient encores d’un arrest irrefragable et necessaire à la quenoüille, 5 ouy mesme à la quenoüille seule[1]. 6 Mais ce qui les peut consoler contre ce mespris, c’est qu’il ne se faict que par

  1. On renvoyait la femme désireuse de s’instruire à la quenouille, comme on l’a renvoyée plus tard au pot au feu. Cet argument commode, tiré des occupations ordinaires de la ménagère, a été très employé. Dans les epistres invectives de ma dame Helisenne, composées par ladicte dame : De Crenne [1543] : nous trouvons un passage où la quenouille est également invoquée. Il s’agit de la quatrième épître intitulée Epistre exhibée par ma dame Helisenne à Elenot, lequel excité de presumption temeraire, assiduellement contemnoit les dames qui au solatieux exercice literaire se veulent occuper : mais pour le divertir de sa follie, icy est faicte commemoration des splendides et gentilz espritz, d’aucunes dames illustres. Helisenne indignée s’écrie : « Et parlant en general, tu dis que femmes sont de rudes et obnubilez espritz : parquoy tu conclus, qu’autre occupation ne doibvent avoir que le filler… J’ay certaine évidence par cela, que si en ta faculté estoit, tu pro-