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morale au milieu d’une incessante transformation. Mais c’est précisément parce que cette transformation a été incessante qu’elle a été insensible et qu’elle est difficile à apprécier. On ne parvient à s’en rendre compte qu’en se plaçant successivement à deux époques suffisamment éloignées l’une de l’autre, et alors même, l’absence, dans la théologie de Vinet, de l’élément critique qui accentue les différences et qui combat les opinions adverses, le besoin qu’il éprouvait d’édifier surtout et, par suite, de ménager les transitions ; en un mot, sa méthode essentiellement positive empêche quelquefois de mesurer l’espace que le penseur chrétien a parcouru entre deux dates.

Il est un point cependant où le développement ayant été plus rapide, le passage d’une manière de voir à une autre a aussi été plus marqué et a laissé une trace plus distincte. En d’autres termes, on peut signaler, dans la pensée religieuse de Vinet, deux phases suffisamment caractérisées et que sépare l’intervalle qui s’est écoulé entre la première édition des Discours et la publication des Nouveaux Discours, entre 1831 et 1841.

C’est, en effet, à la première édition des Discours qu’il faut s’attacher pour bien saisir la différence que nous voulons signaler. Cette première édition se composait de quatorze discours, dont huit portaient un caractère philosophique, apologétique et dogmatique très prononcé. Dans la seconde édition (1832), l’auteur ajouta quatre discours, puis quatre encore dans la troisième (1836), et aujourd’hui le volume paraît tout chargé de modifications et d’additions qui en dé-