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relisait. Il revenait constamment à Pascal, à Racine, à Bossuet. Il ne faisait point un cours sur une époque littéraire sans étudier de nouveau les principaux auteurs de cette époque, et quelquefois jusqu’à leurs moindres écrits. Ce n’est pas tout ; on trouvait fréquemment sur sa table des ouvrages nouveaux français, anglais ou allemands. Et cette activité partagée tout entière, semble-t-il, entre la lecture, l’enseignement, la prédication, la composition d’articles innombrables et de volumes de longue haleine, cette activité qui s’éparpillait encore sur des entretiens, des lettres à écrire, des services à rendre, était constamment interrompue par les accès d’une cruelle maladie. Nous venons de parler de services à rendre. On a vu Vinet, pour obliger un ami, corriger le style d’un gros ouvrage d’agriculture. Mais revenons.

Vinet n’est point un théoricien littéraire. Il n’a pas, en matière de goût, une doctrine toute faite et toute prête à s’appliquer à tous les sujets. Mais il a réfléchi aux divers genres, il en connaît et en rappelle les conditions avec le tact d’un esprit sensible et exercé. Il n’est pas non plus précisément érudit. Le champ de sa critique c’est la littérature française, principalement celle des trois derniers siècles. Les littératures étrangères ne lui fournissent que rarement des termes de comparaison. La littérature classique est à peu près en blanc dans ses travaux, ou n’y paraît que sous la forme de citations d’Horace que sa mémoire lui fournissait avec profusion et avec à-propos. Ses prédilections littéraires semblent le porter surtout vers la poésie et