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permettent dès à présent à chacun d’étudier Vinet comme littérateur et comme critique.

Il faut avouer que si les articles littéraires de Vinet doivent compter parmi ses meilleurs écrits, c’est que certains défauts de sa pensée étaient dissimulés par le genre même. On regrette souvent dans ses grands ouvrages le manque d’ordre systématique et de ce que les Allemands appelleraient le talent architectonique. Le Mémoire sur la liberté des cultes, l’Essai sur la manifestation des convictions, la brochure sur le Socialisme, sont extrêmement défectueux sous ce rapport. Aussi Vinet, à dire vrai, a-t-il publié beaucoup d’écrits, mais n’a-t-il pas laissé un livre. Dans un article, le défaut de méthode se faisait moins sentir, et l’on éprouvait sans mélange le charme qu’exerçaient l’inépuisable abondance des idées, la finesse des aperçus, l’imprévu des expressions, le goût littéraire, l’élévation chrétienne, la sympathie universelle et tant d’autres qualités attachantes.

D’un autre côté, il est une circonstance qui doit nuire un peu à la fortune définitive des morceaux dont Vinet enrichissait le Semeur. Ces morceaux sont très spécialement et très consciencieusement des comptes-rendus, ils analysent les ouvrages qu’il s’agit de faire connaître, ils en offrent des citations, ils en apprécient la conception, les pensées, le style. Il est difficile, à cet égard, de traiter à la fois les auteurs et les lecteurs avec plus de respect que ne faisait Vinet. Mais si ce genre de critique est à sa place dans un journal, s’il y conserve, en tout état de cause,