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évangélique comme étant de même nature que d’autres convictions intellectuelles et morales, et comme ne différant de la foi des religions humaines que par son objet et par son influence. Le chrétien croit comme ont cru Léonidas, Brutus et Christophe Colomb, c’est-à-dire qu’il a foi à l’invisible ; mais cette foi n’emprunte point une nature spéciale à l’objet particulier auquel elle s’applique ; elle conserve quelque chose de formel et d’extérieur ; ce n’est point elle qui sauve, c’est l’œuvre de Christ ; car la foi n’a pas de vertu propre, et elle ne sert qu’à ménager le contact du pécheur avec le fait divin.

Le discours sur l’Œuvre de Dieu (1841) nous présente une notion de la foi, sinon entièrement différente, au moins considérablement développée, et cela dans une direction subjective. La foi, enseigne ici Vinet, doit nécessairement être conforme à son objet ; on ne croit pas au Sauveur comme on croit à je ne sais quelle nouvelle rapportée par une gazette ; la foi embrasse Jésus-Christ ; mais embrasser Jésus-Christ, c’est renoncer à soi-même, c’est consentir à être sauvé par gràce, c’est en même temps se soumettre à la loi ; bref, c’est la régénération et toute la vie chrétienne à l’état de principe et d’enveloppement. Dès lors, dit Vinet, comment la foi ne serait-elle point une œuvre et la première des œuvres ? Comment d’ailleurs pourrait-elle justifier si elle n’était une œuvre, c’est-à-dire quelque chose de moral ? Comment le salut pourrait-il être promis à un simple assentiment de l’esprit ?