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privée de sens ; elle est en outre multiple et variable. C’est la forme sans le fond. D’autre part, l’universel pur, c’est l’essence sans la forme, c’est-à-dire une abstraction logique. En réalité, l’essence n’existe pas plus sans la forme que la forme vraie sans l’essence qui la pénètre et la vivifie. La substance éternelle elle-même ne peut se concevoir sans des attributs qui la déterminent. C’est l’erreur commune des philosophes d’avoir admis séparément ces deux termes. Aussi, n’ont-ils pu passer de l’un à l’autre et combler l’intervalle. C’est la pierre d’achoppement de tous les systèmes.

Toute connaissance véritablement absolue repose donc non sur l’opposition ou la distinction, mais sur l’identité de ces deux termes qui ne se différencient que dans leur développement. Telle est l’idée absolue de l’absolu lui-même. Toutefois, celui-ci ne se confond pas avec l’un ou l’autre des deux termes et ne s’y absorbe pas ; il est leur essence commune ; il se manifeste en eux, mais leur reste supérieur. Il s’y manifeste de deux manières, sous la forme du réel dans la nature, sous celle de l’idéal dans l’homme ou dans l’histoire ; de là le monde réel et le monde idéal. Et ces deux mondes conservent le même ordre de priorité et de prédominance que les deux termes eux-mêmes.

Mais, sans sortir du monde réel ou physique, nous trouvons déjà l’identité des deux termes et l’absolu lui-même dans deux existences qui en offrent un dou-