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dépendent, non de la liberté, mais de quelque chose qui en diffère et lui est supérieure.

C’est une supposition nécessaire à la liberté, que l’homme soit libre pour ce qui regarde son action, mais que, pour ce qui regarde le résultat final, il dépende d’une nécessité qui lui est supérieure et qui a la main dans le jeu de sa liberté. Cette supposition doit être expliquée transcendantalement. En vain voudrait-on en donner le mot par la providence ou par le destin, ce sont précisément la providence et le destin qu’il s’agit d’expliquer. Nous ne doutons pas de la providence, nous ne mettons pas plus en doute ce qu’on nomme le destin, car nous en sentons l’influence dans nos propres actions, dans le bon ou le mauvais succès de nos propres desseins ; mais qu’est-ce donc que ce destin, que cette providence ?

Réduit à des expressions transcendantales, voici ce que signifie le problème : comment, puisque nous sommes complètement libres, c’est-à-dire, puisque nous agissons avec conscience, peut-il s’élever pour nous quelque chose dont nous n’avons pas conscience, que nous ne prévoyons jamais, et que, livrée à elle-même, la liberté n’eût jamais produit ?…

Toutes nos actions aboutissent finalement à un résultat dont la réalisation peut être atteinte, non par l’individu isolé, mais seulement par toute l’espèce. Le résultat de nos actions ne dépend donc pas de moi, il dépend de la volonté de tous les autres, et je n’ai aucun pouvoir sur le but, si tous ne veulent pas le