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radis ne sont pour ainsi dire que le système de la théologie développé in concreto et architectoniquement. La mesure, les nombres et les rapports qu’il observe dans la partie intérieure de ce système étaient déterminés d’avance par cette science ; et il a renoncé ici, à dessein, à la liberté de l’invention, afin de donner à son poëme, illimité quant au fond, une nécessité et des limites extérieures, par la forme. Le caractère sacré des nombres et leur signification est une autre forme extérieure sur laquelle s’appuie sa poésie. C’est ainsi, qu’en général, toute la science logique et syllogistique de son temps n’est pour lui qu’une forme, qu’il faut lui accorder pour atteindre à cette région dans laquelle se trouve sa poésie.

Dante, cependant, en s’attachant ainsi aux conceptions religieuses et scientifiques, comme aux idées les plus universellement reçues que lui offrit son siècle, ne cherche jamais une espèce de vraisemblance poétique d’un genre inférieur ; par là, au contraire, il écarte bien plutôt toute pensée de flatter un sens grossier. Son entrée dans l’enfer se fait, comme il convenait, sans qu’il cherche prosaïquement à la motiver ou à la faire comprendre ; elle a lieu dans un état semblable à celui d’une vision, et encore sans intention de la donner comme telle. Son inspiration, puisée dans les yeux de Béatrice par lesquels la force divine pénètre, en quelque sorte, dans son ame, il l’exprime en une seule ligne. Le merveilleux de ses propres aventures, il le convertit immédiatement en