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ment sur la toile (6). Mais le fait de s’approprier ainsi un beau étranger, non acquis par soi-même et, par-là aussi, incapable d’être bien compris, ne pouvait satisfaire chez eux un penchant artistique, qui les portait à remonter au véritable principe d’où le beau devait s’engendrer de nouveau, libre, plein de sève et de force. Ils ne craignaient pas de paraître simples, sans art, froids, en comparaison de ces grands génies de l’antiquité, et d’enfermer longtemps, la fleur de l’art dans son bouton, jusqu’au moment où la grâce viendrait l’épanouir. D’où vient que nous regardons ces ouvrages, des anciens peintres, depuis Giotto jusqu’au maître de Raphaël, maintenant encore, avec un espèce de sentiment religieux et même avec une sorte de prédilection, si ce n’est parce que la vérité naturelle de leurs tableaux et le sérieux imposant et calme avec lequel ils respectent librement les limites de la nature, nous inspirent, malgré nous, la vénération et l’admiration ? Or, ce que ceux-ci étaient par rapport aux anciens, nous le sommes par rapport à eux. Aucune tradition vivante, aucun lien organique de développement progressif ne rattache notre époque à la leur. Nous devons renouveler l’art sur leurs traces, mais avec originalité, si nous voulons leur ressembler. Sans doute, à la fin du xvie et au commencement du xviie siècle, ce rejeton de l’art pouvait bien pousser quelques nouvelles fleurs sur la souche ancienne, mais nullement produire des germes féconds, et encore moins faire naître une nou-