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uniforme, froid et sans effet. Il savait non-seulement produire la beauté parfaite, mais aussi briser son uniformité par la variété de l’expression.

Si le caractère peut s’exprimer même dans le repos et l’équilibre de la forme, il n’est cependant, à proprement parler, vivant que dans l’activité. Nous nous représentons le caractère comme la réunion de plusieurs forces agissant constamment de manière à conserver un certain équilibre et une mesure déterminée, de sorte que si cet équilibre vient à être rompu, un autre lui succède avec la même harmonie de formes. Mais si cette unité vivante doit se montrer en action et en mouvement, cela n’est possible qu’autant que les forces, violemment soulevées par quelque cause, sortent de leur équilibre. Or, chacun reconnaît que c’est ce qui a lieu dans les passions.

Ici, nous rencontrons ce précepte de la théorie qui ordonne de modérer, autant qu’il est possible, les passions, lorsqu’elles éclatent au dehors, afin que la beauté de la forme ne soit pas violée. Mais nous croyons devoir plutôt retourner le précepte et l’exprimer ainsi : Les passions doivent être tempérées par la beauté elle-même. Car il est très à craindre que cette modération que l’on recommande ne soit aussi entendue d’une manière négative, tandis que la véritable loi de l’art est bien plutôt d’opposer à la passion une force positive. Car, de même que la vertu ne consiste pas dans l’absence de passions, mais dans la force de l’esprit qui les maîtrise, de même ce n’est