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L’ambition est sans doute au-dessus de mes forces et de ce que j’appellerai mon talent, faute d’un mot plus humble, mais j’ai rêvé d’être un utile intermédiaire entre vous qui défendez la fortune de vos femmes et de vos enfans, et la métropole qui doit la liberté aux nègres.

Vos intérêts actuels et les imprescriptibles intérêts de l’humanité sont en lutte. Le problème à résoudre est de les concilier.

Tel est le but de mon livre.

Je voudrais entraîner votre plein consentement à l’abolition de l’esclavage, car abolition de l’esclavage, c’est justice. Je voudrais que la métropole vous donnât une indemnité, car indemnité, c’est justice. La résistance aveugle et folle de quelques-uns de vos frères, qui a tant nuit aux créoles vis-à-vis des honnêtes gens, se perdrait alors dans la paix et la sainteté de la grande œuvre accomplie.

Si, malgré mes efforts, l’invincible horreur que m’inspire l’état social des colonies avait quelquefois revêtu mes expressions d’une âpreté irritante, n’en tenez aucun compte. Imitez-moi. Je vous garde affection, quoique vous soyez maîtres, parce qu’il n’y a que cela de mauvais en vous ; reconnaissez-moi pour votre ami, quoique je me fasse le défenseur des esclaves, parce que je désire avec une égale ardeur le bien de tous.

Maintenant, si les déplorables passions qui agitent votre société finissent par vous dominer, si l’auteur vous