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Nous comptons beaucoup que la promptitude de la répression des délits aux audiences de chaque jour, amènera une grande diminution dans le nombre même des délits. Bien des animosités aussi qui prennent naissance dans les lenteurs des tribunaux, et les plaidoiries des avocats viendront expirer au pied de ce tribunal, dont les arrêts sont entièrement gratuits et dont le caractère est essentiellement conciliateur et paternel. C’est pour cela que nous donnons aux juges-de-paix le droit d’employer la force publique pour faire observer leurs sentences, Nous voulons éviter ainsi les procédures onéreuses auxquelles il faut souvent recourir pour obtenir exécution de leurs arrêts, Il n’y a aujourd’hui que les riches qui puissent avoir justice.

Jusqu’à nouvel ordre

« Les juges-de-paix et leurs greffiers devront être exclusivement métropolitains, et perdront leur place par le fait de leur mariage avec une femme de la colonie ou de toute acquisition d’immeubles dans le pays[1]. »

« Le juge-de-paix rendra mensuellement à l’autorité supérieure un compte des affaires portées à son tribunal et de l’état de sa commune. »

« Les juges-de-paix ne peuvent être révoqués que par ordre du ministre, ou en cas d’urgence par le gouverneur assisté en conseil du procureur-général, du président de la Cour royale et de deux juges-de-paix[2]. »

« Les juges-de-paix exerceront la juridiction qui leur est attribuée par la présente loi, nonobstant toute loi contraire antérieure. »

Les magistrats destinés à remplir ces hautes fonctions doivent être choisis avec un soin particulier. Ils sont appelés à devenir les arbitres et les conseils de la population. Ils forment la pierre angulaire de l’ordre nouveau. Il faudrait qu’ils fussent tous doués, s’il était possible, des deux qualités les plus rares à trouver réunies chez les hommes : la bonté et la fermeté.

  1. Nous étendons cette interdiction à tous les ordres judiciaires. La magistrature doit être entièrement métropolitaine, tout-à-fait indépendante dans le pays, sans intérêt local d’aucune nature ; cela est nécessaire jusqu’à ce que les passions de caste qui divisent les colonies soient éteintes.
  2. Nous laissons à la sagesse du législateur de décider si un magistrat, juge-de-paix ou autre, peut être poursuivi par une partie civile, à raison de l’exercice de ses fonctions, C’est une question de la plus haute gravité, touchant au droit politique, et sur laquelle nous n’avons pas assez réfléchi pour donner notre opinion.