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clavage ; » leurs législateurs assemblés répondraient encore : « Le temps n’est pas venu d’abolir la glèbe. »

Et ici nous ne prétendons pas infliger un blâme particulier aux colons ; ils suivent la loi de l’égoïsme humain. Pas plus chez nous que chez eux on n’a jamais fait convenir ceux qui profitent d’un abus, qu’il est temps de le détruire. C’est pourquoi nous disons et répèterons toujours qu’il faut en finir malgré leurs réclamations. L’esclavage est un nœud qu’aucune science ne pourra dénouer ; il faut se résoudre à le couper. Tout ce qui sera fait avant la complète et radicale extinction du pouvoir du maître, sera vain.


§ VIII.

les maîtres sont incapables de l’œuvre de transformation
et indignes d’en être chargés.


Sous de certains rapports les blancs ne sont pas plus civilisés que leurs nègres. — Le fait de la servitude a corrompu le maître aussi bien que l’esclave. — Il faut reprendre tout à nouveau. — Attitude de la population blanche durant les débats de l’affaire Mahaudière.


M. Bovis, trompé par ses bons désirs, juge des autres par lui-même ; il dit que les planteurs doivent être chargés de la transformation, parce que seuls ils connaissent le terrain ; qu’ils voudront être bienveillans pour leurs engagés, et s’efforcer de les améliorer, parce que leur avenir serait attaché à cette transformation heureuse ; qu’à défaut de leur humanité, on peut compter sur leur instinct de conservation et leur intérêt.

À notre sens, c’est là méconnaitre le cœur humain : on ne peut compter sur l’intérêt des colons comme garantie de leur participation à la régénération de la race avilie, qu’en leur retirant toute chance d’éviter le grand but. Autrement, tant qu’il leur restera la moindre facilité d’exploiter le nègre, ils voudront toujours l’exploiter, ils ne lui accorderont rien d’eux-