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à votre examen, et que nous revendiquons de votre loyauté pour prix de notre hospitalité ; j’ose espérer que vous le ferez entendre dans les publications auxquelles vous attacherez votre nom.

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« Donc, monsieur, résumant mes pensées, je conclus :

« Abolition immédiate ! Engagement au sol ! Indemnité d’au moins 1500 fr. par tête ! Transformation laissée aux colons. — »

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Ainsi le parlement décrète l’abolition et l’indemnité d’abord, plus l’engagement des affranchis au sol, jusqu’à ce qu’ils soient en état de jouir de la liberté. Les colons restent chargés du soin de les préparer. Voilà bien les termes, si nous ne trompons, de ce brillant programme.

Je ne vois d’avantage là dedans que pour les maîtres qui touchent l’indemnité et qui gardent leurs anciens esclaves sous le nom d’engagés, avec leur ancien pouvoir, sous le nom de protectorat. C’est le travail forcé substitué au travail esclave. Les mots sont changés, pas les choses ; et nous nous étonnons qu’un esprit aussi sérieux, aussi éclairé que celui de M. Bovis s’y soit laissé tromper. L’engagement au sol, c’est la glèbe. La glèbe a été dans le passé un amendement à la servitude, que les temps barbares pouvaient accepter, mais que l’on n’est pas obligé d’adopter. Glèbe ou esclavage, en définitive, c’est tout un.

L’esclavage actuel n’est en réalité, par la force des choses et pour le plus grand nombre, qu’un état analogue à la glèbe. Ses crimes tiennent à sa nature même, et l’on ne pourra pas les prévenir avec la seule magie du mot glèbe, parce que glèbe et servitude ne sauraient exister sans arbitraire, et que l’arbitraire ne va jamais sans abus. Vous appelleriez l’univers entier en témoignage de votre abolition de la servitude, que si vous la remplacez par une institution semblable, vous n’aurez rien fait. Votre résolution aboutit à un déplacement d’autorité qui passe de vos mains dans celles d’un magistrat, car je suppose