Page:Schœlcher - Des colonies françaises, 1842.djvu/401

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des fortunes. L’apprentissage, ou pour mieux dire, la substitution du gouvernement au maître, avait enfanté la plus désastreuse anarchie. »


§ VII.

ENGAGEMENT AU SOL ; NÉANT DE TOUT MOYEN TRANSITOIRE.


Lettre de M. Bovis sur l’engagement au sol. — Entre l’engagement au sol et la servitude, il n’y a d’autre différence que celle du travail forcé au travail esclave. — Le nègre ne voudra pas de la glèbe. — Les colons l’ont combattue d’avance. — La glèbe reculerait indéfiniment l’abolition.


Reste maintenant l’engagement au sol, celui de tous les modes de transition qui paraît sourire davantage aux colons qui sentent la nécessité de faire un pas quelconque vers l’affranchissement. Nous allons transcrire une longue lettre qui contient toute la théorie de ce système et résume d’une manière très pittoresque les idées généralement émises par les créoles pour l’appuyer. Notre correspondant, M. Bovis (de la Guadeloupe), est un homme progressif, mais à la fois ardemment dévoué à la cause coloniale, qui est la sienne propre.

« Tout ce qui a été écrit sur l’esclavage, soit en bien, soit en mal, me démontre que le monde a tort à l’heure qu’il est, de faire le procès à ceux de l’antiquité qui possédaient des esclaves, comme aux esclaves eux-mêmes qui s’acceptaient pour tels. Je ne dirai certainement pas que l’esclavage est de droit divin, je dis tout simplement que c’est un fait génésiaque, arrivé je ne sais d’où, ni comment, mais certainement le fait le plus anciennement constaté ; il se mêle aux instincts de sociabilité de l’homme, car à peine en voit-on quelques-uns de rassemblés, que déjà quelques-uns sont esclaves : c’est un parasite qui a cru dans la racine de l’arbre et a grandi avec lui.

« L’homme a reçu de Dieu ses instincts de sociabilité, mais