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vent rien faire, parce qu’ils compromettraient la sécurité des maîtres.

Vaut-il donc mieux laisser se perpétuer la misère et l’oppression des esclaves ? Sont-ce là les nouvelles doctrines des apôtres du Christ ? Nous comprenons très bien que les créoles veuillent empêcher les prêtres de parler, mais nous ne comprenons pas que les prêtres consentent à se taire. N’y a-t-il après tout que les esclaves qui puissent exciter le courage des missionnaires ? Ils ne peuvent leur dire la vérité ; eh bien ! que ne la disent-ils au moins aux maîtres ? Que ne leur enseignent-ils haut, fort, énergiquement, sans crainte, que le premier devoir d’un chrétien moderne est de renoncer à posséder des esclaves ? Les blancs sont en morale dans des ténèbres aussi profondes que celles où se trouvent les nègres ; l’éducation des maîtres est tout entière à faire, comme celle des esclaves. Pourquoi les prêtres l’oublient-ils ? Est-il donc vrai que la foi n’est plus, et que le temps des martyrs est passé !

Le zèle apostolique se trouvant réduit à de telles froideurs, tant que l’administration soumise aux influences locales comme elle l’est, conservera le pouvoir d’embarquer à son gré et sans jugement un prêtre pour un sermon ; on n’aura aux colonies que des ecclésiastiques, sinon ouvertement coupables, du

    conduire à la geôle le noir Toussaint, de la fabrique attaché au cimetière, pour le faire punir de ce qu’il a manqué essentiellement à son devoir, en quittant le travail pendant toute une demi-journée qu’il a passée dans la débauche. »

    Cayenne, 30 août 1840.

    Le président de la fabrique,
    Signé Guillier,
    Préfet apostolique.

    Vu pour vingt-neuf coups de fouet à donner au nègre Toussaint.

    Cayenne, le 30 août 1840.

    Signé, le maire,
    F. Roubault