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trois personnes distinctes ne font qu’un seul Dieu qu’on appelle la Sainte-Trinité. — Comment ces trois personnes ne font-elles qu’un seul Dieu ? — Parce qu’elles ne sont qu’une même nature une seule et même divinité. — Pouvons-nous comprendre cela ? — Non, c’est un mystère, mais nous devons le croire parce que c’est Dieu qui nous l’a révélé. »

Tel est ce que l’on enseigne aux nègres, aux esclaves et à leurs enfans ! À de pauvres gens qui n’ont jamais usé de leurs facultés réflectives ! J’ai vu sur les habitations, les belles filles blanches se donner la peine de mettre tous ces mots dans la mémoire des marmailles assemblés autour d’elles, et quelques-uns d’eux les répéter assez couramment. Ces enfans noirs font ce que pour mon compte je me déclare incapable de faire, ils apprennent par cœur sept ou huit pages d’une langue qu’ils ne comprennent pas, car il ne faut point l’oublier, les nègres et surtout les négrillons n’entendent pas le français, ils ne parlent que créole. Voyez de quel profit le catéchisme à l’usage des colonies peut être pour leurs sentimens religieux ! Ils n’y trouvent qu’une lettre morte, pour eux privée de tout sens, et confondant par fois une réponse avec l’autre, ils répliquent lorsqu’on leur demande par exemple combien il y a de personnes en Dieu ? — Trois : la foi, l’espérance et la charité. »

Ce n’est pas que nous accusions les bonnes jeunes filles qui enseignent, de se borner à mettre des mots dans la tête de leurs élèves, elles ne peuvent autre chose. Le catéchisme est presqu’impossible à traduire en créole, les expressions d’un langage naturellement très borné et sans aucune formule métaphysique, font défaut pour rendre des idées si subtiles, que les hommes les plus forts d’entre nous deviennent insensés à vouloir les approfondir. Il nous a été dit que malgré ces difficultés le curé du Carbet (Martinique), M. l’abbé Goux, était parvenu à faire une traduction du catéchisme, mais on ne voudra peut être pas croire ce qui est arrivé, et pourtant cela est vrai, il lui a été interdit par l’autorité supérieure de la publier. — Les conseils coloniaux ont volé des fonds avec un certain éclat