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coup compter dans une occasion, parce que la plus grande partie sont de pauvres Irlandais enlevés par force ou par surprise, qui gémissent dans une dure servitude de sept ou de cinq ans au moins, qu’on leur fait recommencer quand elle est finie, sous des prétextes dont les maîtres ont toujours une provision toute prête. »

Les engagés soumis à un pareil destin, après une traversée longue et très pénible, seraient morts bien vite, partout autre part qu’aux colonies. Les nègres succombaient en aussi grand nombre qu’eux. C’est une complète erreur de supposer que nos îles aient obtenu, sans sacrifices, à part même les exécrables forfaits de la traite, la population de travailleurs qu’elle possède aujourd’hui. Les nègres paient à une modification de température, à peu près le même tribut que nous, et malgré leurs vieilles relations avec le soleil, les nouveaux-venus noirs, lorsqu’on ne les soigne point avec ménagement, ne résistent pas plus que les nôtres à la chaleur humide des colonies. Nous avons l’autorité d’un médecin distingué de la Martinique, M. Rufz, pour affirmer que les nègres ne sont pas plus que les blancs à l’abri des influences des Antilles, et que leur acclimatement, mal dirigé, a coûté aussi cher que pourrait coûter celui des blancs. Les noirs sont peut être plus sensibles que nous encore à un changement atmosphérique ; ils se font au quartier où ils naissent, et lorsqu’on les déplace, ils ne réussissent pas, selon l’expression créole, ce qui veut dire en bon français qu’ils meurent. Les partisans les plus déterminés de l’escla-