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de betteraves en Europe, le cabinet de Saint-James a voulu détruire toutes les Antilles, pour accaparer le monopole de l’indispensable denrée qu’il fabriquerait dans l’Inde. Ainsi l’Angleterre aurait augmenté sa dette de 500 millions de francs, elle aurait sacrifié l’existence de quatre-vingt mille des propres enfans de la Grande-Bretagne établis dans le West-Indies, pour l’éventualité lointaine d’un avenir impossible ; elle aurait escompté d’avance à ce taux criminel ses douteux succès de l’Inde, dans l’espérance comme nous n’avons pas été peu surpris de l’entendre répéter à la tribune le 17 janvier 1842, dans l’espérance de concentrer en ses mains le monopole des denrées coloniales ! Et ces infâmes calculs elle s’y serait livrée, sûre que l’Europe entière ne pourrait deviner de pareils desseins, et se viendrait prendre à de gros piéges recouverts d’une fausse philantropie.

Nous sommes désolé d’en juger ainsi, mais nous n’avons qu’un mot contre un tel raisonnement c’est qu’il est absurde, aussi absurde que l’idée de domination des mers prêtée à la Grande-Bretagne. Où sont les niais ? parmi ceux qui rêvent ces folles et monstrueuses inventions, ou parmi ceux qui disent « vous faites le gouvernement britannique plus égoïste qu’il n’est. Il recula tant qu’il put l’affranchissement. Lui, en proposant l’abolition et les chambres en la votant, ne fit que céder à la force irrésistible de l’opinion publique. Une seule pétition des dames de la Grande-Bretagne fut présentée à la séance des communes du 15 mai 1833, chargée de cent quatre-vingt sept mille signatures. C’est même comme cela que s’explique d’une manière très simple, le phénomène autrement incompréhensible du législateur décrétant l’abolition du fouet pour les nègres des Antilles, tandis qu’il le maintient pour les soldats et les marins de la métropole. Le peuple en masse s’était saisi de la question de l’affranchissement, il le voulait, le parlement obéit. Le ministre des colonies, lord Stanley ne le dissimula point « en présence de l’unanimité du peuple anglais, disait-il aux communes (15 mai 1833), le temps