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de payer à leurs compatriotes des instrumens qui se brisent ou se tordent après huit jours de service. Nous avons vu, en visitant les magasins de commission de la Dominique, des houes et des coutelas d’une forme spéciale que l’Angleterre fabrique exprès pour nos colonies, où elles entrent en fraude. C’est un fait honteux à dire, mais d’une triste authenticité. La détestable qualité des produits de fabrique française a considérablement nui à notre commerce d’exportation ; la pacotille nous cause sur les marchés étrangers un mal qu’on ne saurait imaginer, et le mot trop commun dans nos ateliers : « Bah ! c’est assez bon pour les colonies, » nous a ravi bien des millions. La mauvaise foi la plus effrontée, préside malheureusement aussi à nos envois au dehors. La parfumerie française est une branche considérable du trafic interlope de nos colonies avec les West-Indies, car les Anglais qui font de nous tous autant de petits maîtres musqués usent dix fois plus de pommades et de senteurs que les Français. J’ai vu sur leurs toilettes des pots de pommade fabriqués de telle manière qu’ils n’avaient pas six lignes de contenu, quoiqu’ils eussent en réalité trois pouces de hauteur. C’est vendre un morceau de faïence pour de l’essence de jasmin.

Il faudrait au contraire que toute marchandise qui sort de France fut particulièrement soignée et expédiée avec la plus rigoureuse probité. Il n’y a pas d’autres moyens de rétablir notre crédit. Puisque nos fabricans entendent si mal leurs devoirs d’honnêtes gens et leurs intérêts de manufacturiers, il serait opportun