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CHAPITRE XVII.

ÉTAT DE LA QUESTION.

Il ne faut pas tout-à-fait juger des colons par les discours de leurs députés gagés, ou les brochures de quelques-uns d’entre eux. — Les crimes du passé ne sauraient justifier les crimes du présent. — Les colons ne défendent pas l’esclavage pour lui-même. — Le courage civil manque aux colonies comme en Europe. — La censure est aussi une des plaies attachées à l’esclavage. — Belle contenance des créoles, lors des derniers bruits de guerre. — Leur folle haine contre les abolitionistes. — le mot philantrope est devenu une injure parmi eux. — L’Angleterre et les betteraviers sont les Pitt et Cobourg des créoles. — Les projets de monopole du sucre indien sont absurdes, les colons éclairés de disent eux-mêmes. — La France n’est pas ennemie des colonies. — La propriété esclave n’est défendue que par les propriétaires de nègres et leurs salariés. — Il y a des possesseur d’esclaves parmi les abolitionistes. — Que les colons approuvent ou n’approuvent pas l’émancipation, ils doivent céder au vœu universel qui la demande. — Les difficultés de l’affranchissement seront d’autant plus vite surmontées que les créoles l’accepteront avec moins de résistance. — Le titre de délégués des colonies que prennent les délégués des blancs, est une usurpation qui choque la justice et le sens commun.


Nous avons dit tout ce que nous avions à dire sur le régime des esclaves, sur leur caractère et leur nature, sur l’état actuel de la société coloniale ; maintenant que nous croyons avoir assez exploré le terrain, nous pouvons y marcher, sans trop de crainte de nous égarer, et aborder la question de l’esclavage.

En résumant d’une manière attentive et scrupuleuse les impressions recueillies auprès des créoles, pris individuellement, nous trouvons que, sur cette matière proprement dite, ils gagnent à être connus. Ce qu’ils disent vaut mieux que ce qu’ils écrivent, et ce qu’ils font vaut mieux que ce qu’ils disent. On les a chargés d’une responsabilité qui ne leur appartient pas, et il faut déplorer que la mauvaise manière dont ils se sont défendus par eux-mêmes et par leurs écrivains gagés, ait trompé l’Europe sur leur compte.