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Vous avez abaissé ainsi cette race à nos yeux, par tous les moyens possibles ; vous avez défendu à ceux qui en font partie de porter des habits pareils aux nôtres[1], vous nous avez défendu à nous de leur donner le titre de monsieur dans aucune transaction écrite ou verbale ; vous leur avez fait du respect pour nous un devoir légal[2] ! Où pouvions nous prendre considération pour eux ?

  1. Un règlement des administrateurs, du 9 février 4779, montre d’une manière encore plus précise que tous ceux que nous avons cités, la différence des classes et l’abaissement de la population de couleur. Parmi les raisons qui déterminèrent les administrateurs à l’établir ; on trouve celle-ci : « L’assimilation des gens de couleur avec les personnes blanches dans la manière de se vêtir, et le rapprochement des distances d’une espèce à l’autre dans la forme des habillemens, sont des points contre lesquels il est très important d’exciter la vigilance de la police, etc. » En conséquence, art. 1er : « Il est enjoint aux gens de couleur ingénus ou affranchis de l’un ou de l’autre sexe, de porter le plus grand respect à leurs anciens maîtres, et à leurs patrons, de se montrer bienveillans non-seulement envers leurs veuves où orphelins, mais encore envers tous les blancs en général ; à peine d’être poursuivis extraordinairement si le cas y échet, et punis selon la rigueur des ordonnances même par la perte de la liberté si le manquement le mérite. »

    Art. 2. « Leur défend très expressément d’affecter dans leurs vêtemens, coiffure, habillement ou parures, une assimilation répréhensible avec la manière de se mettre des hommes blancs ou femmes blanches. »

  2. Un arrêté du gouverneur de la Martinique, en date du 12 novembre 1830, relate quelques-unes des prohibitions vexatoires sous lesquelles le délire du despotisme avait courbé la malheureuse classe des libres. On ne peut lire cela sans un étonnement mêlé de stupeur.

    « Art. 1er. Sont et demeurent abrogés :

    « 1° L’article 3 du règlement local du 4 juin 1720, indiquant quel vêtement doivent porter les affranchis et libres de naissance ;

    « 2° L’arrêt du règlement du 9 mai 1765, et l’art. 3 de l’ordonnance du gouverneur et intendant, du 25 décembre 1783, portant défense aux officiers publics de recevoir dans leurs bureaux, en qualité d’écrivains, des hommes de couleur ;

    « 3° Les ordonnances des gouverneurs et intendans, des 6 janvier 1773 et 4 mai 1774, faisant défense aux gens de couleur, libres, de porter les noms des blancs ;

    « 4° L’article du règlement du 6 novembre 1781; qui défend aux