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lui concède exclusivement le commerce des Antilles, y compris la traite des nègres. Ces hommes payaient un droit de cinq pour cent à l’entrée comme les autres marchandises. Un arrêt du conseil du 26 août 1670 nous exempla de ce droit. Deux années après une ordonnance du 13 janvier 1672 accorda une prime de 13 livres pour chaque tête de nègres importés aux colonies. Des lettres patentes de 1696 et 1704 confirment ces privilèges, et Voltaire écrit qu’en prenant un intérêt dans ce trafic « il a fait une bonne action et une bonne affaire. » Le 26 octobre 1784, le roi Louis XVI accorde de nouvelles immunités aux négriers. Le 21 octobre 1787, une dépêche ministérielle recommande de payer dans les colonies la prime de 13 francs qui avait été portée à 60. Ces faveurs se perpétuent sans interruption jusqu’à la révolution, et l’assemblée constituante, elle-même, y met le sceau par un décret qui déclare la traite « commerce national. » Il faut atteindre le 25 juillet 1793 pour voir supprimer ces primes, suppression bientôt suivie à la vérité de l’abolition de la traite et de celle de l’esclavage. (Décret de la Convention du 16 pluviôse an ii, 4 février 1794).

Ainsi c’est bien vous, vous qui nous avez donné la servitude, qui nous avez encouragés à la traite. Vous, vous seuls également nous avez imposé les préjugés qui vous inspirent aujourd’hui tant de dégoût. Nous avions commencé à nous marier avec des négresses, une ordonnance du 20 avril 1711, qu’il fallut même renouveler en 1778, prohibe même en France ces unions entre les deux races, qu’autorisait notre vieux Code noir de mars 1685 ; on nous les interdit comme dangereuses ; et un décret du premier consul (30 pluviôse an xi) réitère cette défense.

Nous étions disposés à confier notre santé aux soins d’hommes de toutes couleurs. Voici comme s’exprime un règlement du roi, du 30 avril 1764. « Art. 16. Défend très expressément S. M., aux nègres et à tous gens de couleur, libres ou esclaves, d’exercer la médecine ou la chirurgie, ni de faire aucun traitement de malades, sous quelque prétexte que ce soit, à