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premier acte des blancs qui dépistent un retraite de nègres, est de brûler les cases, abattre les bananiers et ravager les champs de manioc et de patates qu’ils rencontrent. Le camp, ainsi attaqué, laisse sur la place quelques uns de ses morts, s’enfonce plus avant dans l’obscurité des forêts encore vierges, où on ne peut l’atteindre, et tout est à recommencer d’une et d’autre part. On les découvre à la fin, parce qu’ils ne peuvent faire le vide autour d’eux, mais ils ont une adresse extrême à savoir se préserver des surprises ; leur place pour cela est toujours bien choisie, leurs approches sont hérissées de pièges mortels,

    mée sur les habitations. M. d’Ennery, qui gouvernait alors la colonie, mit sur pied toutes les milices du lieu, fit faire continuellement des patrouilles et des chasses

    « Mais tandis qu’on cherchait les nègres d’un côté, ils pillaient les habitations d’un autre. Plusieurs détachemens étaient tombés dans leurs pièges et s’étaient estropiés. La chose parut devenir plus sérieuse que jamais : c’était le sujet de toutes les conversations du pays, et tout le monde était dans la persuasion qu’il y avait plus de dix mille nègres dans ces deux bandes seules. Dieu sait comme les faits étaient exagérés sur les lieux mêmes !…

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    « Après la mort de M. d’Ennery je partis pour la nouvelle Angleterre. Six mois après les nègres recommencèrent d’aller marronner par bande, et ces bandes se formaient déjà dans plusieurs quartiers. Le corps des chasseurs était rentré dans le néant, avec le souvenir de ses services. On en avait formé deux compagnies de la milice du quartier, on les fit marcher sous les ordres de leurs capitaines blancs, contre les marrons ; mais lorsqu’ils voulaient gravir les montagnes où ils pensaient rencontrer les nègres, les capitaines à demi-morts de fatigue s’y refusaient…

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    « La bande la plus considérable se forma sous la direction du nommé François, nègre très-intelligent, et capable également par son courage des plus grandes entreprises. Sa bande assassina, par ses ordres, plusieurs blancs français et espagnols, et pillaient les habitations et les hattes. »…

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    (Observations sur la situation politique de Saint-Domingue, par M. de Pons ; habitant, 1790.)