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homme à qui je communiquais mes réflexions sur cet horrible boîte, lui faisant observer que l’air y pénétrait seulement au moyen de quelques trous, me répondit d’une manière fort calme : « Mais, monsieur, ils ne sont pas là pour avoir leurs aises ! » Il avait à peine vingt-cinq ans.

Comme nous l’avons déjà expliqué, on n’use guère du cachot que pour la nuit. Généralement le planteur qui veut infliger à son esclave une longue détention, l’envoie à la geôle où il est attaché à ce qu’on appelle la chaîne de police, avec les condamnés de la police correctionnelle. Les femmes, comme les hommes, peuvent être appliquées à cette chaîne. On les voit journellement dans les rues accouplés deux à deux, de même que nos forçats, affligeant l’oreille du grincement de leurs fers et occupés à des travaux de nettoyage sous la conduite de gardiens armés d’une grosse rigoise.

Les îles anglaises recueillent déjà plus d’un bénéfice de la liberté. Nous avons dit qu’elles n’ont plus de fouet, nous pouvons ajouter ici qu’elles n’ont plus de chaînes, ni au dedans ni au dehors de leurs prisons. On n’y entend plus nulle part ces bruits de l’enfer qui attristent encore des villes comme Brest et Toulon.

Outre le fouet et le cachot, il y a encore la barre[1]. Au pied d’un lit de camp est une poutre percée de trous où l’on enferme une jambe ou les deux jambes du condamné, à la hauteur de la cheville. On trouve des barres sur chaque plantation, dans presque chaque maison ; c’est un meuble de ménage à l’usage des colonies. Il n’y a pas d’hôpital qui n’ait sa barre pour les nègres attaqués de mal pied que l’on veut empêcher de marcher. Sous un régime de violence, tout doit revêtir des formes violentes, même le bien.

Le planteur a aussi le droit d’user de chaînes : elles sont

    moins à ma connaissance. C’est justice de le dire, je ne crois pas que l’on puisse trouver dans l’île entière un endroit pareil aux tumulus assez nombreux de la Guadeloupe.

  1. C’est le sepo des Espagnols, le stock des Anglais.