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La France, comme toutes les nations modernes qui se copient les unes les autres, adopta dès le commencement le système de l’exclusion absolue du commerce. La première pierre de nos établissemens d’outre-mer fut posée en 1626, et la première loi prohibitive date du 25 novembre 1634. C’est dix-sept ans après, en 1651, que Cromwell lança le fameux acte de navigation qui interdisait par des moyens violens la liberté commerciale dont jouissaient l’Angleterre et ses colonies. Le privilège des transports pour nos îles fut accordé le 10 septembre 1668, à la compagnie des Indes occidentales. En 1670 nos ports coloniaux furent fermés aux navires étrangers ; en 1671 à toute espèce de marchandises étrangères ; en 1684 on retira aux colons eux-mêmes la faculté d’établir aucune manufacture, ils durent acheter tout de la métropole ; plus encore, on leur défendit de raffiner leurs sucres, le raffinage étant réservé à la métropole.

Un siècle passa sans rien changer à cette étroite économie politique, et les instructions adressées le 25 janvier 1765 au comte d’Ennery, nommé gouverneur-général de nos possessions dans les Antilles, disaient entre autres choses : « La troisième vérité qui fait la destination des colonies, est qu’elles doivent être tenues dans le plus grand état de richesses possible, et sous la loi de la plus austère prohibition en faveur de la métropole. Sans l’opulence elles n’atteindraient point à leur fin[1] ; sans la prohibition ce

  1. Celle de consommer beaucoup de produits manufacturés de la métropole.