L'action la plus orageuse,
J'effort le plus audacieux,
Et le coup le plus furieux
Dépend de cette main nerveuse.
Tout se rend docile à mes voeux,
J'accomplis tout ce que je veux,
Je fais le calme et la tempête ;
Et parmi l'horreur des hasards
Quand je viens à couvrir ma tête,
Je mets à l'ombre le Dieu Mars.
Mes gestes brûlent les campagnes,
Mes soupirs suffoquent le vent ;
Quand je chemine arrogamment
L'on voit les plus hautes montagnes
Dévaler aux lieux les plus creux,
Afin de rendre hommage aux feux
Que font mes démarches terribles ;
Et celles qui ne le font pas
Je les perce comme des cribles,
Et les avale à mes repas.
Les fleuves arrêtent leurs courses
Quand je les regarde courir,
D'un seul maintien je fais mourir
Les dromadaires et les ourses ;
Toute la furie et l'horreur
Que je possède en ma fureur
Ne saurait pas être conçue ;
Et si je voulais enflammer
Un seul des regards de ma vue
Je mettrais le feu dans la mer.