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CHANSON.

Hélas ! elle s’en va, je ne la verrai plus :
À ma juste douleur il faut bien que je céde.
Que les regrets sont superflus,
Dans les maux dont la mort est l’unique reméde !
Après un tel malheur,
Si j’aimois encore la vie,
Que diroit mon amour , que diroit ma douleur,
Et que diroit Silvie ?

Ses yeux doux et flatteurs, et jamais courroucés,
Me faisoient dans mes fers trouver mille délices :
Pour des plaisirs si-tôt passés,
Faut-il donc que mon cœur souffre tant de supplices ?
Mais bientôt la douleur
D’être loin des yeux de Silvie,
Va finir mon amour, va finir mon malheur
En finissant ma vie.


CHANSON.

Mes yeux, vous avez vu Cloris ;
Mon cœur, vous songez à ses charmes ;
Vous l’entendez chanter : hélas ! vous êtes pris.
Rendez, rendez les armes,
Ô mon cœur, ô mes yeux ! c’étoit trop hasarder
Que de l’entendre et de la regarder !

Hélas ! vous savez le danger
Qui suit un amour téméraire,
Et qu’un cœur dans ses fers ne s’en peut dégager ;
Que pensez-vous donc faire ?
Ô mon cœur, ô mes yeux, hélas, que vos plaisirs
Me vont coûter de pleurs et de soupirs !