CHANSON.
Quand je vous dis que vos yeux m’ont brûlé,
Vous faites l’offensée :
Quand je vous cache ma pensée,
Vous m’appellez dissimulé.
Hélas ! que dois-je faire ?
Si je parle, vous vous fâchez ;
Et si je me veux taire,
Vous me le reprochez.
Si vous traitez d’une égale rigueur
Ma plainte et mon silence,
Belle Philis, tout vous offense,
Rien ne peut fléchir votre cœur.
Hélas ! quelle infortune,
Quand je parle et quand je me tais,
Sans-cesse j’importune,
Et jamais je ne plais.
CHANSON.
Philis, vous vous plaignez que je n’ay point d’esprit
À vous parler de mon martyre :
Hélas ! ignorez-vous qu’un mal que l’on peut dire
N’est jamais si grand que l’on dit ?
Un Amant dit assez quand il est interdit,
Quand il languit, quand il soupire :
Mais apprenez, Philis, qu’un mal que l’on peut dire
N’est jamais si grand que l’on dit.
CHANSON.
Hé bien, je consens de mourir :
Aussi-bien l’espoir de guérir
Me flatteroit en vain des douceurs de la vie !
Je n’ai plus qu’un moment à déplaire à vos yeux ;
Vous allez voir, belle Silvie,
Quand je ne serai plus, si vous en serez mieux.