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par le vindicatif valet de Montufar, s’étoit transportée dans la maison de nos hypocrites, y avoit cherché les bienheureux enfans et leur glorieuse mére, et ne les ayant point trouvés, et n’en pouvant apprendre de nouvelles de la servante qui ne savoir point où ils étoient allés, avoit fait sceller tous les coffres, et fait inventaire de tout ce qui étoit dans la maison. Les sergens trouvèrent dans la cuisine de quoi se régaler pour plus d’un jour, et ne laissèrent point en danger de se perdre, ce qu’ils purent s’approprier sans témoins. Là dessus la vieille Mendez entra dans la maison, bien éloignée de s’imaginer ce qui s’y passoit. Les sergent la saisirent, et la menèrent en prison avec un grand concours de peuple. Le valet et la servante y furent retenus avec elle, et ayant trop parlé comme elle, furent condamnés comme elle à deux cent coups de fouet. Mendez en mourut à trois jours de-là, parce qu’elle étoit trop vieille pour une si rigoureuse épreuve, et le valet et la servante furent bannis de Séville pour toute leur vie ; ainsi la prévoyante Héléne garantit son cher Montufar, et se garantit aussi elle-même des mains de la justice, qui les fit chercher envain dans et hors de la ville. Le peuple fut honteux d’avoir été trompé, et les chantres des carrefours qui s’étoient enroués à chanter leurs louanges, firent travailler leurs poètes à gages contre ces faux béats. Ces insectes du parnasse épuisèrent sur ce sujet leur veine diffamatoire, et les chansons qu’ils firent au désavantage de ceux dont il n’y avoit pas longtems que le peuple s’était fait des idoles, se chantent encore dans Séville. Montufar et Héléne prirent le chemin de Madrid aussitôt qu’ils le purent faire sûrement, et y entrèrent riches et mariés ensemble. Ils tâchèrent d’abord d’apprendre des nouvelles de Dom-Sanche de Villefagnan,