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Aussitôt qu’ils furent soûlés,
Ils furent aussi régalés.
Enée eut des gants chargés d’ambre,
Une belle robe de chambre,
Un habit et son balandran,
Qui, pour n’être que du bougran,
Etait riche pour ses paillettes,
Et six douzaines d’aiguillettes.
Achates eut du drap d’Usseau,
De quoi se faire un long manteau,
Ou, s’il veut, une houppelande.
Chacun de la troyenne bande
Eut aussi de Dame Didon
Quelque assez bonne nippe en don.
Chaque Dame eut une hongreline,
Avec sa jupe d’étamine,
Et chaque homme un grand justaucorps
Piqué d’un fort beau fil retors,
Et rebrodé d’une pistagne.
Cependant pour son fils Ascagne,
Encore qu’il ne fût pas loin,
Aeneas était en grand soin.
Il pria son fidèle Achate
De l’aller trouver à la hâte,
Monté sur un vite éléphant,
Afin de réjouir l’enfant,
Et lui faire part des nouvelles ;
Et que des nippes les plus belles
Qu’il avait dedans son vaisseau,
Il apportât tout le plus beau,
Pour faire aussi quelque largesse,
Afin que leur courtoise hôtesse
Connût quelles gens ils étaient,
Et de quel bois ils se chauffaient.
Voici, si j’ai bonne mémoire
(Quiconque ne le voudra croire
Prendra la peine d’en douter),
Les dons qu’on devait apporter,
Par l’ordre du fameux Enée
Quand sa ville fut ruinée,