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Et l’on y voyait maints trophées
D’armes, bien ou mal étoffées.
Ce fut donc en ce temple-là,
Un huissier faisant le holà,
Que l’ambassade fut ouïe.
Latin, la face épanouie,
Dit aux Troyens ce que voici :
"Messieurs, d’où venez-vous ainsi ?
Nous demandez-vous la passade ? "
Un des premiers de l’ambassade,
A ce discours hors de raison
Que leur faisait ce roi grison,
Fut bien fort tenté de répondre
De quoi sa Majesté confondre ;
Mais le roi, qui l’appréhenda,
La chose ainsi raccommoda :
"Qui vous amène en ce rivage
Avec votre grand équipage,
Et par quel bien de vent portés,
Vous êtes-vous ici plantés ?
Nous savons fort bien qui vous êtes,
Et les longs chemins que vous faites,
Depuis que la fureur du Grec
A réduit votre ville à sec.
Quoique peu savant dans l’histoire,
C’est à moi chose fort notoire
Que le bon père Dardanus,
De qui les Troyens sont venus,
Fut né natif de cette terre,
Et, par le moyen de la guerre,
Dans votre terroir phrygien
Qu’il amassa beaucoup de bien.
Maintenant le révérend sire,
Dans le ciel a ce qu’il désire,
Où bien mieux que chez Guénégaud
On a toute chose à gogo,
Où la vapeur des sacrifices
Sent le boudin et les saucisses,
Dont, plus que du vin les Flamands,
Les Dieux sont endiablés gourmands,